« F O D » DE L’ERREUR A LA FAUTE

Tous les salariés de toutes les UP ont récemment été invités à participer à une réunion dite de « sensibilisation » aux FOD pour « FOREIGN OBJECT DEBRIS ». Cela a notamment fait suite à de récents évènements de découvertes de corps étrangers après fermeture de zones sur nos avions.

Ces séances organisées par la Direction locale ont eu pour but de faire des rappels nécessaires sur la sécurité dans l’exécution des travaux par tous les opérateurs chaîne quelle que soit l’unité de production. La Direction a donc rappelé les enjeux et les conséquences que peuvent avoir des corps étrangers dans nos avions.

Mais si comme elle l’a rappelé dans son message, la sécurité c’est l’affaire de tous et notamment de celles et ceux qui interviennent sur avions, nous rappelons aux Directions qu’elles sont aussi responsables de donner les moyens aux salariés de travailler dans le respect des procédures et des règles de sécurité.

Depuis de nombreuses années, la CGT s’inquiète et alerte régulièrement sur le constat de certaines dérives organisationnelles qui viennent multiplier le risque d’erreurs, notamment depuis l’arrivée du LEAN.

Si l’erreur est inhérente à la nature humaine, elle est souvent considérée comme négative et assimilée à une faute qui doit nécessairement être sanctionnée.

Pourtant, avant de passer de l’erreur à la faute, il faut prendre en considération tous les paramètres qui ont pu conduire à cette erreur y compris ceux d’ordre organisationnel. Cela est d’autant plus vrai dans une organisation du travail collective car le facteur socio- collectif peut parfois inciter à prendre la décision politiquement correcte plutôt que la décision optimale. L’une permet d’éviter le conflit qui conduit au stress  là ou l’autre permet davantage le respect des règles/ procédures.

Mais l’organisation du travail est toujours pour les Directions un sujet tabou sur lequel il ne faut jamais revenir puisqu’elle va de pair avec l’objectif de rentabilité de l’entreprise. Pour autant ces alertes à répétitions devraient être un tournant permettant de faire ce que le management moderne aime appeler un « brainstorming » (remue-méninges) pour repositionner certains marqueurs organisationnels et sociologiques dans le management.

Hélas, encore une fois, cette réflexion collective et organisationnelle n’a pas eu lieu dans le discours que nous avons pu entendre.

La Direction nous a donc uniquement fait part de propositions qui reposent essentiellement sur la responsabilité des opérateurs qui interviennent sur avions ; ainsi la Direction a fait les propositions suivantes :

1) Elle demande à tous les opérateurs de faire l’inventaire de leur caisse à outils tous les soirs.

Encore faudrait-il que chaque compagnon possède une caisse à outils avec mousse de positionnement, indispensable au repérage facile d’un outil manquant, comme cela existe en piste.

Il nous semble que faire signer la liste de son inventaire à chaque compagnon, quand on voit le no man’s land architectural qu’il existe au niveau des caisses à outils de l’atelier, a donc ses limites.

À moins qu’il ne permette uniquement à la direction de se désengager dans  sa responsabilité d’accorder les moyens de ses ambitions aux salariés.

D’un point de vu organisationnel, alors que le LEAN pousse de plus en plus les UP à s’orienter vers la mise en commun de certains outils par souci d’économie, comment s’inquiéter de la disparition de l’un d’entre eux quand on sait qu’il peut être possédé par d’autres.

2) La Direction demande à tous les opérateurs de ne prendre que le nécessaire en outils et en ingrédients (vis, écrous, rondelles) pour réaliser les opérations sur avion.

Encore une piste qui oublie ce qu’est le travail réel, car le travail, c’est justement  la différence entre le  prescrit et le réel. Comme cela ne se passe jamais comme prévu c’est bien la valeur ajoutée de l’être humain qui fait la différence. Mais la nature humaine s’adapte toujours à la situation de travail en fonction des moyens qu’on lui donne, alors :

– Soit la direction cesse de réduire les standards de production et accepte qu’un compagnon puisse faire de multiples allers/retours entre sa zone de travail, sa caisse à outils et le kanban de service d’ingrédient ou il doit s’approvisionner pour réaliser le travail réel.

– Soit elle donne les moyens de sécuriser l’ensemble des outils parfois nécessaires à la réalisation de la tâche qui va souvent au-delà de la simple opération prescrite.

-Soit elle remet ce que l’organisation du travail a fait disparaître, à savoir les barquettes plastifiées avec les ingrédients nécessaires (toujours présent chez airbus) qui étaient servies par les magasiniers pour chaque opération.

3) La Direction demande à tous les opérateurs un rangement et un nettoyage des passerelles et des postes de travail.

C’est une évidence, mais alors pourquoi avoir supprimé le nettoyage des passerelles et le rangement des zones de travaux avions avec un bon de travail spécifique chaque vendredi après-midi ?

Peut-être qu’une organisation du travail de type « LEAN » de l’anglais « maigre, sans gras, dégraissé » est passée par là.

4) La Direction va mettre en place un groupe de travail sur le sujet.

Parfait mais ici encore faudrait-il que ce groupe intègre une véritable représentativité de compagnons et contrôleurs, les plus concernés par ce risque de FOD.

De fait, la démarche de faire signer une liste d’inventaire de caisse par les compagnons aurait dû se faire après réflexion  d’un tel groupe de travail et la mise en place de moyens.

 

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