Monsieur TRAPPIER, Monsieur SEGALEN et Monsieur PETIT.
« En préambule à ce Comité Central d’Entreprise d’Unité Économique et Sociale entre les sociétés de Dassault-Aviation et de Dassault Falcon Service, les élu(e)s CGT et UGICT-CGT dénoncent et condamnent l’attitude du gouvernement qui, par son déni de démocratie et son refus de tout dialogue, utilise une deuxième fois le 49/3 pour imposer, en deuxième lecture à l’Assemblée Nationale, sa « loi travail » rejetée par 70 % de la population et soutenue dans les actions par 62 % de celle-ci. »
« Cette loi s’inscrit dans la continuité des lois Macron et Rebsamen. »
« Pour nous, cette loi, associée au démantèlement du code du travail, est et restera inacceptable. »
Depuis le dernier CCE du mois de Mai, vous avez rencontré les organisations syndicales en Juin dernier, pour faire un point sur l’activité et la situation de l’entreprise.
Vous restez confiants sur la signature du 3ème contrat de Rafale Export par l’Inde, mais sans toutefois connaitre la date de celle-ci. Le contrat de rénovation du Mirage 2000 D a bien été notifié par l’état.
Quant aux problèmes du moteur SILVERCREST du Falcon 5 X, ces derniers semblent résolus. Nous entendons même le déstockage de l’avion N°1 en Septembre 2016, pour un point fixe en Janvier 2017 et un premier vol au mois de Mars 2017. Pouvez-vous nous confirmer cette bonne nouvelle ?
La semaine dernière le Falcon 8X a décroché ses certifications EASA et FAA. Les premières livraisons aux clients pourront être effectives au début du quatrième trimestre de cette année. Même si le marché civil n’est pas à la hauteur de vos espérances, l’obtention des certifications du F8X va permettre un lancement de production dans les sites de fabrication qui étaient en légères sous charges pour quelques-uns d’entre eux.
Vous devez annoncer à ce CCE des mesures que vous qualifiez de peu contraignantes mais vous n’excluez pas la possibilité de se revoir en Septembre si la situation des commandes ne s’améliorait pas d’ici là.
De plus, vous avez mis en place un groupe d’études, sur le thème de l’entreprise de demain, qui doit apporter des pistes de réflexions, à moyen terme (sur une dizaine d’année), sur une rationalisation industrielle des établissements avec l’introduction de nouveaux moyens industriels.
Pour les élus CGT et UGICT-CGT, le Conseil d’Administration et la Direction Générale poursuivent inlassablement leur logique de financiarisation de l’entreprise au détriment parfois de ses produits mais bien souvent de son personnel. Pour nous, cette logique de baisse des coûts a atteint ses limites et devient contreproductive.
Avant, la finance n’était qu’un outil au service du travail, unique facteur de création de valeur, désormais c’est le travail qui est au service du résultat financier, promis aux actionnaires.
Tout naturellement, ce constat des élus CGT nous renvoie à la loi du 14 juin 2013, dite sur la « sécurisation de l’emploi » dans laquelle les CE ou CCE sont consultés sur les orientations stratégiques de l’entreprise et sur leurs conséquences sur l’activité, l’emploi, l’évolution des métiers et des compétences, l’organisation du travail, le recours à la sous-traitance, à l’intérim, à des contrats temporaires et à des stages.
Dans ce cadre, vous voulez faire signer aux organisations syndicales un accord sur « la gestion des emplois et des parcours professionnels et sur la mixité des métiers » (ex GPEC), qui est censé dévoiler aux partenaires sociaux les orientations stratégiques société pour les trois prochaines années sans qu’il n’y soit évoqué, ne serait-ce qu’une seule fois, un mot sur la formation des salariés, rien sur l’usine du futur et des retombées éventuelles pour le personnel.
À la réunion du 19 juillet prochain, la délégation CGT interviendra dans ce sens et ne laissera pas la Direction Générale proposer à la signature des organisations syndicales, une orientation stratégique déjà obsolète et incomplète, qui peut se révéler être une véritable bombe à retardement dans les prochaines années.
Pour les élus CGT, la situation industrielle et financière de notre entreprise n’est sûrement pas aussi noire que vous voulez nous la montrer. Nous sommes dans la situation du verre à moitié plein ou à moitié vide.
Le carnet de commandes est passé, en un an, de 7.4 Md€ à 13.7 Md€ au 31 décembre 2015, représentant 174 avions à livrer (83 Rafale sans compter le contrat Indien et 91 Falcon). Pour les avions d’affaires en 2015, le fait de ne pas avoir pu proposer aux clients les deux produits phare a sûrement été un handicap, qui aujourd’hui, est en partie levé, puisque le F5X redémarrerait sous peu et le F8X, certifié pourra être livré, d’ici la fin de l’année.
Pour une meilleure analyse et compréhension de l’état des commandes 2016, il est dommageable que ce CCE se tienne 14 jours avant la divulgation officielle des chiffres semestriels du 21 juillet 2016 mais, depuis le temps que vous pratiquez ainsi, vous nous avez habitués à ce genre de « rétention d’informations à peine cachée. »
Si la tendance 2015, concernant l’augmentation des effectifs, a continué en début 2016, elle ne concerne que principalement Saint-Cloud et Istres avec des Spécifiques Etudes et des Non Spécifiques. Cependant, les embauches ont fortement ralenti depuis Avril.
Pour les élus CGT, les Spécifiques Fabrication sont encore les plus mal lotis, mais ce n’est sûrement pas un hasard si l’on en croit vos propos, M TRAPPIER, publié dans un article de l’Usine Nouvelle : « Dassault Aviation a besoin de produire un peu plus à l’étranger ».
Pour mémoire, le ratio Cadres/Non cadres en 2005 était de 50,3 % pour 49,7 %
au 31/12/2015 il est de 57,4 % pour les Cadres et 42,6 % pour les Non Cadres.
Un dernier gros sujet qui nous interpelle fortement, et qui se situe essentiellement dans les sites de fabrication avec la tentative de mise en place de nouvelles pratiques sur les badgeuses au poste de travail, le temps d’habillage et de déshabillage et la pause de 12 minutes alors que tout cela fonctionnait très bien jusqu’à présent.
Visiblement, l’annonce de l’abandon de l’OTT que vous aviez faite il y a tout juste un an, ici même, est de retour. Les directions reviennent à la charge d’une autre manière dans les sites, sans aucune concertation avec les salariés, les agents de maitrises et les IRP concernés.
Sachez que la CGT a déjà contacté les Inspections du travail concernées qui nous ont confortés dans notre analyse.
Aujourd’hui certains droits et compensations pour les salariés ne sont pas respectés dans certains de nos accords. Nous sommes déjà prêts à mettre tout en œuvre pour que cela change, en espérant qu’une solution raisonnable soit privilégiée.
Il serait quand même fort dommage qu’une solution de type perdant/perdant
(Comme depuis trop longtemps pour les NAO) soit encore mise en place
En 100 ans l’entreprise a bien changé, modernisation de l’outil de travail, robotisation, numérisation etc…autant de transformation, de progrès technologique qu’il a fallu développer, année après année, avec les salariés qui se sont succédé.
Aujourd’hui avec le lancement de l’étude sur l’entreprise de demain, nous voyons bien que pour vous, une étape supplémentaire doit être franchie, pour soi-disant :
« Être plus compétitif et dégager encore plus de marges bénéficiaires».
Si la CGT peut comprendre l’arrivée d’usines numériques, de nouvelles technologies, de nouveaux matériaux, etc…pour développer l’avion du futur, elle restera vigilante de l’impact du changement de l’organisation du travail sur les conditions de travail des salariés.
Il convient donc, à notre sens, de redonner la parole aux salariés, aux instances représentatives du personnel, de les écouter quant aux choix et orientations qui pourraient être pris par la société, afin de sortir des décisions unilatérales, verticales, applicables sans discussion possible.
En conclusion, les élus CGT et UGICT-CGT restent confiants en l’avenir, mais seront attentifs quant aux informations que vous nous donnerez à partir d’aujourd’hui.
En découlera, si nécessaire dans le cadre du Droit d’Alerte, une demande d’expertise société.